Le jus de betterave abaisse la pression artérielle des hypertendus

 

Auteur :Vincent Bargoin

23 avril 2013 De Medscape France

Londres, Grande-Bretagne - Le jus de betterave rouge, traitement antihypertenseur de demain ? Dans la revue Hypertension, une équipe britannique montre que l'augmentation des nitrites circulants - liée à l'ingestion dudit jus de betterave - réduit significativement la pression artérielle (PA) de sujets hypertendus [1].

Les nitrites (NO2-) sont connus pour leur effet vasodilatateur : c'est le principe du nitrite d'amyle. Chez le volontaire sain, l'effet hypotenseur d'une élévation des nitrites circulants a par ailleurs été montré. Chez l'hypertendu, en revanche, l'hypothèse n'avait apparemment pas encore été testée. C'est la première originalité du travail britannique, la seconde étant d'avoir évalué l'apport de nitrate inorganique (NO3) d'origine alimentaire.

On note au passage que l'équipe n'en est pas à son coup d'essai, puisqu'elle a notamment travaillé sur la transformation des nitrates inorganiques alimentaires - dont le jus de betterave est riche - en nitrites par la flore buccale.

Baisse de la PAS et de la PAD, ralentissement de l'onde de pouls

Les premiers tests ont été effectués sur un modèle de rats spontanément hypertendus. Un effet des nitrites sur la PA a été confirmé, effet dose-dépendant et apparemment beaucoup plus marqué que chez des rats normotendus.

La preuve de principe chez l'homme a été obtenue chez 15 sujets présentant une hypertension de grade 1, et jamais traités pharmacologiquement pour leur hypertension.

Ces sujets ont été randomisés entre une quantité de 250 mL de jus de betterave, correspondant à 3,5 mmol de nitrate inorganique, et le même volume d'eau.

Dans le premier groupe, le taux de nitrites circulants a été multiplié par un facteur 1,5. Les auteurs indiquent que cette élévation est significative, mais qu'elle n'est pas suffisante pour induire une baisse significative de la PA chez des sujets normotendus.

Chez les sujets hypertendus, en revanche, une baisse de la PAS de 11,2 mm Hg a été constatée entre trois et six heures après l'ingestion du jus de betterave, contre - 0,7 mm Hg chez les buveurs d'eau (p<0,001). A 24 heures, la baisse de PAS dans le premier groupe restait encore de 7,2 mm Hg par rapport à la valeur initiale. La PAD était elle aussi abaissée, de 9,6 mm Hg à six heures. On note enfin un ralentissement de la vitesse des ondes pulsatiles chez les patients « traités » au jus de betterave (p<0,05), absent chez les sujets buveurs d'eau.

Un traitement efficace et peu coûteux ?

En termes de mécanisme, les expériences menées chez le rat durant la phase initiale, ont montré que l'effet des nitrates, transformés en nitrites, est pratiquement aboli par l'allopurinol, un inhibiteur de la xanthine oxydoréductase. L'enzyme a été impliquée dans les phénomènes oxydatifs associés à de nombreuses pathologies respiratoires et cardiovasculaires (athérosclérose, insuffisance cardiaque, HTA, lésions d'ischémie-reperfusion). Les auteurs précisent que la xanthine oxydoréductase impliquée a une localisation érythrocytaire. On n'en sait guère plus pour le moment.

Ces résultats comportent bien entendu des limites. L'expérience n'a duré que 24 heures ; on peut donc s'interroger sur la pérennité de l'effet. Elle ne concernait par ailleurs que des hypertendus naïfs ; obtiendrait-on les mêmes résultats chez des patients traités depuis des années ? Il reste que si l'on parle de réduction des coûts de santé, y inclus les coûts induits par les effets indésirables, (et aussi de relocalisation de la production), l'option betterave mérite d'être approfondie. Et pour ceux qui n'aiment pas les betteraves, les légumes verts ont aussi une forte teneur en nitrate inorganique.

 

Les auteurs, eux, concluent que leurs résultats « sont en faveur d'une supplémentation en nitrates alimentaires comme stratégie antihypertensive efficace, mais simple et peu coûteuse ».