Pr Walter Willett : Une consommation importante de calcium ne prévient pas les fractures

(Interview reprise du site "La nutrition.fr" du 31 Mars 2011)

Le Pr Walter Willett est le président du département de nutrition de l’Ecole de santé publique de Harvard (Boston). Il est considéré comme le plus éminent spécialiste de nutrition au monde.

Selon lui, la solution contre l’ostéoporose ne passe pas par des apports élevés en calcium.

Pr Walter Willett : Une consommation importante de calcium n...

LaNutrition.fr : Que répondez-vous aux autorités sanitaires françaises qui recommandent à la population de consommer 3 à 4 laitages par jour ?

Pr Walter Willett : Ni le calcium, ni les laitages ne sont la solution contre l’ostéoporose. Les pays qui consomment le plus de calcium ont les taux de fractures les plus élevés. Dans les deux études prospectives que nous conduisons à Harvard, l’Etude des Infirmières et l’Etude des Professionnels de santé, il n’y a aucune relation entre la quantité de calcium ou de lait consommée par les hommes et les femmes et leur risque de fractures. La plupart des autres études ont abouti à la même conclusion. La question de l'apport optimal en calcium est compliqué par les preuves dont nous disposons, qui montrent que des apports élevés, soit environ trois verres de lait par jour, augmentent probablement les risques de cancer fatal de la prostate.

De combien de calcium avons-nous besoin ?

Le calcium est un nutriment essentiel, mais l'apport optimal est une question non résolue. Pour les adultes de plus de 50 ans, les États-Unis recommandent 1200 milligrammes par jour, le Royaume-Uni, 700 milligrammes par jour, quant à l'Organisation mondiale de la Santé, elle a conclu à partir des mêmes données qu’un apport de 500 milligrammes par jour est adéquat.

Pourquoi les apports conseillés en calcium aux Etats-Unis et en France sont-ils plus élevés que les 500 mg conseillés par l’OMS ?

La principale justification d’une consommation élevée de calcium est la prévention de l'ostéoporose et des fractures, et la plupart des désaccords vient du fait que les défenseurs d’apports élevés en calcium s’appuient sur des études à court terme évaluant les dépôts de calcium dans les os pour définir les besoins. En réalité, les résultats des études à long terme ne soutiennent pas les bénéfices attribués à des consommations élevées de calcium ou de lait dans la prévention du risque de fracture. Les conclusions de l’OMS ont été influencées par le fait que la plupart des adultes dans le monde consomment peu ou pas du tout de produits laitiers, ont des apports en calcium inférieure à 500 milligrammes par jour, et ont tendance à avoir des taux de fractures plus bas que nous connaissons en Amérique et en Europe, où le calcium et la consommation de lait sont relativement élevés.

Concrètement, quelle quantité de calcium conseiller à la population ?

Compte tenu de tous les éléments de preuves, un apport compris entre 500 et 700 mg par jour pour les adultes semble être raisonnable. Pour les enfants, les apports devraient être plus élevés en raison de la nécessité d'accumuler du calcium dans les os en croissance, mais les besoins exacts ne sont pas encore clairs.

Faut-il consommer des laitages pour couvrir ses besoins en calcium ?

Une alimentation équilibrée permet de couvrir les besoins en calcium. Nous conseillons une à deux bonnes sources de calcium par jour, qui peuvent inclure un laitage par jour.

Comment prévenir les fractures ?

D'autres facteurs, en particulier un apport suffisant en vitamine D et une activité physique régulière, sont beaucoup plus importants qu’une consommation importante de calcium pour prévenir les fractures. Si vous êtes préoccupé par la santé de vos os et que vous souhaitez prévenir les fractures, oubliez le lait et emmenez plutôt la vache faire un tour. Les os les plus solides sont ceux sur lesquels on exerce une pression.

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Atricle repris du site "La nutrition.fr",  (Chuck Laurie - Samedi 05 Mars 2011)

  

Les besoins en vitamine D seraient 20 à 40 fois supérieurs aux apports conseillés

  • Les besoins d'un adulte en vitamine D en prévention des maladies chroniques seraient de 4000 à 8000 UI/jour
  • La France continue de recommander 200 UI/j

Des chercheurs américains de l'Université de Californie, de l’Ecole de médecine de San Diego et de l’université Creighton à Omaha, parmi lesquels deux des plus grands noms de la recherche sur la vitamine D, ont calculé que les recommandations officielles en vitamine D (200 UI/jour en France) sont bien trop faibles pour atteindre les niveaux sanguins de cette vitamine qui permettent de prévenir le cancer du sein et d’autres maladies chroniques. Leurs conclusions ont été publiées le 21 février 2011 dans le journal Anticancer Research.

« Nous avons constaté qu’un adulte doit disposer chaque jour de 4000 à 8000 UI (unités internationales)de vitamine D pour maintenir les taux sanguins des métabolites de la vitamine D dans la fourchette permettant de réduire de moitié environ le risque de plusieurs maladies - cancer du sein, cancer du côlon, sclérose en plaques, diabète de type 1 », explique le Pr Cedric Garland (université de Californie), l’un des auteurs de l’étude et un pionnier de la recherche sur cette vitamine . « J'ai été surpris de constater que les apports nécessaires pour maintenir le statut en vitamine D dans la zone protectrice sont si élevés. Beaucoup plus élevés que la dose de 400 UI / jour qui était nécessaire pour vaincre le rachitisme au 20e siècle. »

La vitamine D est synthétisée lors de l'exposition aux UVB du soleil, mais seulement entre mars et octobre dans l'hémiqphère nord; à la saison froide, la longueur d'ondes du rayonnement UVB ne permet pas cette synthèse.

L'étude fait état d'une enquête sur plusieurs milliers de bénévoles qui prenaient des suppléments de vitamine D à des doses allant de 1000 à 10000 UI / jour.  Des bilans sanguins ont été effectués pour déterminer le niveau de 25(OH)D - la forme sous laquelle la quasi-totalité de la vitamine D circule dans le sang.

« La plupart des scientifiques qui travaillent activement sur la vitamine D pensent maintenant qu’il faut avoir une concentration de25(OH)D de l’ordre de 40 à 60 ng /ml pour prévenir de nombreuses maladies », dit le Pr Garland. « Malheureusement, seulement 10 pour cent de la population américaine a de tels niveaux et il s’agit principalement de personnes qui travaillent à l'extérieur. »

« Maintenant que les résultats de cette étude sont publiés, il va devenir banal pour presque tous les adultes de prendre 4000 UI de vitamine D par jour, » dit le Pr Garland. « C'est une dose bien inférieure aux 10000 UI/j qui est le seuil inférieur du risque d’hypervitaminose D arrêté par les autorités sanitaires américaines, et les avantages sont considérables. Les personnes qui peuvent avoir des contre-indications devraient discuter de leurs besoins en vitamine D avec leur médecin de famille. »

« Il est maintenant temps que pratiquement tout le monde prenne plus de vitamine D pour aider à prévenir certains types majeurs de cancer et plusieurs autres maladies graves, et des fractures », selon Robert Heaney, lui aussi co-auteur de l’étude.

L'analyse de LaNutrition.fr. En 2001, l'ex-Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa, aujourd'hui Anses) a divisé par deux l'apport nutritionnel conseillé (ANC) en vitamine D pour un adulte, le ramenant de 400 à 200 UI par jour. Cette opération a été réalisée arbitrairement, sans la moindre justification scientifique. Cinq ans plus tôt, en 1996, le Conseil supérieur d'hygiène publique de France (CSHPF) avait décrété que la dose maximum de sécurité pour la vitamine D est de 1000 UI par jour - sous-entendu, au-dessus de 1000 UI par jour, des risques pour la santé peuvent apparaître. Depuis, Thierry Souccar et Isabelle Robard dans Santé, mensonges et propagande (Seuil) ont montré que ce chiffre de 1000 UI est entaché d'une erreur de calcul, et que le CSHPF aurait dû retenir le chiffre de... 10000 UI. Quoi qu'il en soit, ni l'ANC de la vitamine D, ni sa dose de sécurité n'ont été à ce jour rectifiés. Il en résulte une situation qui pénalise l'ensemble de la population française, parce que médecins et pharmaciens hésitent à délivrer des doses de vitamine D supérieures à 1000 UI/j et surtout parce que les doses autorisées pour l'enrichissement des aliments en vitamine D correspondent à une fraction des 200 UI - autant dire qu'elles n'ont aucune influence biologique sur le statut des consommateurs. Par ailleurs, l'Institut national du cancer continue de prétendre qu'il faut "éviter de se mettre au soleil aux heures chaudes en été", alors que c'est précisément à ce moment qu'il faut s'exposer et exposer ses enfants pour constituer de bonnes réserves de vitamine D - certes pas plus de 15 à 20 minutes, visage protégé, mais si possible bras, torse et jambes nus.

>Pour aller plus loin

Le livre du Dr Brigitte Houssin Soleil, mensonges et propagande, vous dit tout sur la vitamine D.

Référence

Garland CF. Vitamin D Supplement Doses and Serum 25-Hydroxyvitamin D in the Range Associated with Cancer Prevention. Anticancer Res Feb 21 2011