La méthylation, pourquoi c’est fondamental et à quoi ça sert ?
La clé de voûte d’une multitudes d’actions vitales au sein de notre organisme
Article repris du site Nutriting.com
Qu’est-ce que la méthylation ?
La méthylation est un processus métabolique vital. Il a lieu en permanence dans toutes les cellules de notre organisme à un rythme effréné (jusqu’à un milliard de fois par seconde). Biochimiquement, il s’agit d’un processus extrêmement simple qui consiste en la transmission d’un groupe méthyle (un atome de carbone lié à 3 atomes d’hydrogènes, ou CH3) d’une molécule à une autre.
Mais ce procédé, simple en apparence, permet à lui seul d’assurer une multitude de fonctions dans le corps humain, comme la production et la régulation de très nombreuses molécules dont des neurotransmetteurs et hormones dans le cerveau, la détoxification du corps via la production de glutathion (qui n’est autre que l’antioxydant le plus puissant du corps humain), la dégradation de l’histamine dans l’intestin, mais aussi et surtout, selon l’une des grandes découvertes de ces dernières années, il permet la modulation de l’expression de certains gènes de notre ADN via des processus épigénétiques.
L’épigénétique, qu’est-ce que c’est ?
Comme on peut le lire sur le site de l’INSERM : « Alors que la génétique correspond à l’étude des gènes, l’épigénétique s’intéresse à une « couche » d’informations complémentaires qui définit comment ces gènes vont être utilisés par une cellule ou… ne pas l’être. » 1
Dit autrement (et en simplifiant la chose), nous héritons d’un patrimoine génétique de nos parents. Ces gènes nous prédisposent à certaines choses, qu’elles soient positives (comme certaines capacités physiques) ou négatives (comme certaines pathologies). Jusqu’à récemment, nous pensions que nous ne pouvions échapper à cet héritage, et que nous subissions l’influence de nos gènes quoi qu’il advienne.
L’épigénétique est une science nouvelle, elle montre au contraire que les gènes ne sont que des prédispositions, mais que leur influence dépendra entièrement de notre mode de vie : l’alimentation, le stress, les pensées, la pollution environnante, etc.
La capacité des gènes à s’exprimer, ou non, en fonction du mode de vie, dépendra ainsi entièrement de la méthylation.
1 https://www.inserm.fr/information-en-sante/dossiers-information/epigenetique
La méthylation est donc indispensable pour l’entretien, la réparation et la fabrication de nos cellules, la communication intracellulaire, et plus particulièrement, l’héritage d’informations épigénétiques d’une cellule mère aux cellules filles lors de la division cellulaire (qui est le mode de reproduction des cellules).
On soupçonne des défauts de méthylation d’être à l’origine d’une grande quantité de pathologies très variées, allant de l’autisme à Alzheimer, en passant par les troubles de l’anxiété, les crises d’angoisses, les troubles déficitaires d’attention avec ou sans hyperactivité, et bien d’autres. Il est donc primordial de maintenir un bon niveau de méthylation dans le corps.
Ce processus essentiel est fonction de deux paramètres principaux : les facteurs environnementaux, en particulier l’alimentation, ainsi que les facteurs génétiques.
La méthylation est un processus clé de notre corps, qui a lieu de manière naturelle tout le temps et partout dans notre organisme. Un défaut dans ses rouages, et cela peut être la cause d’innombrables symptômes et pathologies sérieuses. Il est donc important de comprendre comment tout ceci fonctionne, et de savoir si l’on est concerné par un mauvais fonctionnement, qu’il soit hérité ou induit.
Au cœur de la méthylation se trouve un acide aminé essentiel : la méthionine. Sans elle, pas de méthylation possible ! Elle est présente dans toutes les sources de protéines, mais est particulièrement abondante dans les protéines animales. La méthionine, comme son nom l’indique, comporte donc ce fameux élément essentiel : un groupe méthyle (qui comme expliqué en introduction, n’est ni plus ni moins qu’un atome de carbone lié à 3 atomes d’hydrogènes). Cependant, en l’état, la méthionine ne peut céder son groupe méthyle à une autre molécule. Il faudra avant cela qu’elle se transforme (en se combinant avec une molécule d’ATP) en sa forme métaboliquement active appelée S-adénosyl-L-méthionine, ou SAM.
L’ATP, pour Adénosine TriPhosphate, est une molécule clef qui fournit l’énergie nécessaire à toutes les cellules de notre corps (métabolisme, locomotion, division cellulaire, transport, etc.). C’est donc en quelque sorte la particule énergétique élémentaire et universelle, sans laquelle rien n’est possible dans le corps humain.
La SAM, ainsi formée, va alors devenir l’un des principaux donneurs de groupes méthyles du corps humain. On estime qu’environ 80% des processus de méthylation auxquels elle participe ne servent qu’à la fabrication de deux composants (ou familles) indispensables et essentiels pour le cerveau : la créatine et la phosphatidylcholine. Les 20% restants représentent donc des centaines de réactions, parmi lesquelles celles que nous avons évoquées en introduction.
Une fois son groupe méthyle cédé, la SAM, devenue alors SAH (pour S-adénosyl-L-homocystéine), se dégradera en homocystéine (en libérant sa molécule d’ATP précédemment acquise).
Si l’homocystéine ainsi créée peut s’avérer dangereuse en excès (nous le verrons dans la partie suivante), c’est également le cas de la méthionine. En effet, trop de méthionine donnera trop de SAM, et il y a alors risque d’hyperméthylation. Pour éviter cela, la glycine (un acide aminé présent essentiellement dans la peau et les os) sera utilisée au gré des besoins pour dégrader la SAM en SAH également, et ainsi éviter une méthylation excessive non souhaitable. La glycine est donc particulièrement importante pour son rôle tampon dans ce processus.
On voit donc déjà ici que plus nous consommons de méthionine, plus nous allons fabriquer de SAM, et plus nous avons besoin de glycine pour tamponner l’excès de SAM.
L’homocystéine est connue pour être un marqueur du risque cardiovasculaire, mais également – et plus récemment – neuropsychiatrique. De fait, bien que nécessaire au déroulement de certains processus, son accumulation n’est pas souhaitable, car elle pourrait provoquer des lésions des cellules endothéliales (les cellules qui constituent l’endothélium, la couche intérieure des veines qui est en contact avec le sang). Ainsi, un taux trop élevé d’homocystéine doit immédiatement alerter, non seulement car en soi l’accumulation de cette molécule pourrait s’avérer dangereuse, mais surtout car il est signe d’un dérèglement du cycle de méthylation, et peut donc entraîner des conséquences pathologiques sérieuses.
Heureusement, l’homocystéine a 3 voies biologiques pour se reconvertir.
Deux de ces voies vont servir à recycler l’homocystéine en méthionine, car l’homocystéine n’est, ni plus ni moins, qu’une molécule de méthionine sans son groupe méthyle ! Il suffit donc de lui rajouter un groupe méthyle pour « re-fabriquer » la méthionine d’origine, et le cycle repart.
La troisième voie servira à fabriquer du glutathion à partir de l’homocystéine.
La méthylation commence par la méthionine, un acide aminé essentiel présent dans la viande, le poisson, les œufs, les laitages, le soja, etc. Après quelques transformations, la méthionine est donc utilisée dans le processus de méthylation pour fabriquer de nombreux composés essentiels pour le cerveau.
Elle sera alors dégradée en homocystéine, un composé qui, lorsqu’il s’accumule, peut devenir extrêmement toxique pour l’organisme, mais surtout, indique un problème dans le cycle de méthylation. En ce sens, l’excès d’homocystéine est donc un premier indicateur qui alerte sur une méthylation problématique.
Une fois l’homocystéine créée, l’organisme va donc devoir la recycler d’urgence à travers divers processus. Deux de ces processus vont regénérer de la méthionine à partir de l’homocystéine ; un dernier processus se servira de l’homocystéine pour fabriquer le gluthation.
Comment alors se procurer un groupe méthyle, puisqu’il vient d’être cédé ?
La voie royale passe par ce qu’on appelle le cycle des folates. Lorsque l’on ingère des folates (communément regroupées dans les vitamines B9) via notre alimentation, ou de l’acide folique synthétique dans certains compléments, ceux-ci vont subir de multiples transformations enzymatiques dans le but de recevoir un groupe méthyle. La forme finale et métaboliquement active s’appelle 5-méthyltétrahydrofolate, ou plus simplement 5-MTHF.
Le 5-MTHF devient alors donneur de groupe méthyle pour la vitamine B12, qui de simple cobalamine (= forme de base), passe alors à l’état de méthylcobalamine (= cobalamine + groupe méthyle). Cette forme peut enfin transmettre à son tour son groupe méthyle tout juste acquis à l’homocystéine, ce qui permettra donc de recycler la méthionine. La cobalamine résultante attendra, elle, un nouveau groupe méthyle provenant du cycle des folates. Le 5-MTHF, devenu lui simple tétrahydrofolate (THF), retournera également dans le cycle pour pouvoir à nouveau recevoir un groupe méthyle. Et ainsi de suite, là encore.
Evidemment, ce cycle ne fonctionne pas en vase clos, et les nutriments (folates, vitamine B12, etc.) finissent tôt ou tard par être dégradés, ou utilisés dans d’autres processus, d’où l’importance d’en apporter suffisamment et continuellement.
La deuxième voie de recyclage utilise, elle, de la choline, un autre nutriment que l’on classe souvent parmi les vitamines B. La choline possède déjà un groupe méthyle, mais devra, elle aussi, être convertie dans une forme « active » appelée triméthylglycine (ou TMG), avant de pouvoir le transmettre (la TMG est parfois abusivement appelée bétaïne, les bétaïnes représentant en réalité un ensemble de composés). La TMG cèdera alors l’un de ses 3 groupes méthyles à l’homocystéine, et le cycle de la méthionine pourra ainsi continuer.
La dernière voie de reconversion de l’homocystéine est aussi la plus importante. Nommée voie de transsulfuration (il ne s’agit plus de cycle ici), elle est utilisée pour créer des composants vitaux comme la taurine, mais aussi et surtout, le principal antioxydant du corps humain : le glutathion (aussi appelé GSH). L’homocystéine va d’abord être catabolisée (= dégradée) via plusieurs transformations nécessitant de la vitamine B6, ainsi que de la sérine (un acide aminé très abondant dans les protéines), pour donner de la cystéine. Cette dernière va alors s’adjoindre d’abord à l’acide glutamique (ou glutamate sous sa forme ionique, un autre acide aminé), puis à de la glycine, pour former le fameux glutathion. La taurine quant à elle sera fabriquée plus tard dans le cycle.
1- La première repose sur les folates et la vitamine B12, qui, après de multiples transformations enzymatiques, vont pouvoir retransformer l’homocystéine en méthionine, et le cycle initial de repartir.
2- La deuxième repose sur la choline, un nutriment essentiel généralement rangé dans la classe des vitamines B, qui, lui aussi, subira quelques transformations avant de pouvoir régénérer l’homocystéine en méthionine à nouveau.
3- Enfin, la dernière voie va transformer l’homocystéine en composés essentiels comme la taurine ou le glutathion, le plus puissant antioxydant du corps humain, grâce à l’intervention de multiples nutriments, en particulier la glycine.
Pour clarifier tout ce que nous venons d’expliquer, la méthylation n’est rien de plus que la transmission d’un groupe d’atomes CH3 (appelé groupe méthyle) d’une molécule à une autre. Bien que de nombreuses molécules possèdent un ou plusieurs groupes méthyles, elles ne peuvent pas le céder à n’importe quelle autre molécule, et souvent, une molécule donnée fournira son groupe méthyle à une autre molécule donnée, qui le fournira à son tour à une autre, etc. Un peu comme une chaîne humaine se passant de main en main le fameux Graal, chaque donneur ayant un receveur attitré, qui devient à son tour donneur pour un autre receveur attitré, etc. Si une personne manque dans le cycle, c’est tout le cycle qui s’effondre.
Ainsi par exemple, les folates vont devenir methyl-folates pour pouvoir donner leur groupe méthyle à la vitamine B12, qui à son tour le donnera à l’homocystéine, qui deviendra alors méthionine, puis cette dernière donnera son groupe méthyle pour de nombreuses réactions (sous sa forme SAM) avant de redevenir homocystéine, qui pourra à nouveau accepter un groupe méthyle de la part de la vitamine B12, et ainsi de suite.
Ce mécanisme indique l’étroite imbrication entre les différents cycles et voies de méthylation, et les nutriments desquels ils dépendent. Bien qu’indispensable à l’ensemble de ces processus, la méthionine subit une conversion en homocystéine qui, si elle s’accumule en excès, peut devenir délétère. Il est donc indispensable qu’elle soit recyclée par des voies métaboliques qui font appel à d’autres nutriments essentiels : folates, vitamines B12 et B6, choline ou TMG (ou triméthylglycine) et glycine en particulier.