La vitamine D et ses multiples fonctions
(Tiré d'un diaporama du site Medscape France du 5 mars 2013)
Auteurs
Robert Finn (
Assignment Editor, Medscape Medical News, San Francisco, É.-U.) - Deborah Flapan (
Director, Medscape Medical News, Chicago, É.-U.) - Darbe Rotach (
Medscape Senior Photo Editor, New York, É.-U. )
Traduction : Dr Andrée Nisard, gastro-entérologue
Cette vitamine qui n'est pas une vitamine
Quatrième vitamine découverte, la vitamine D est un ensemble de sécostéroïdes comprenant l'ergocalciférol (vitamine D2) et le cholécalciférol (vitamine D3). Le terme de vitamine est habituellement réservé à des substances vitales que l'organisme humain ne peut pas synthétiser.
Avec du cholestérol et du soleil le corps peut synthétiser sa propre vitamine D, ce n'est donc pas, en réalité, une vitamine alimentaire essentielle.
Des carences sévères en vitamine D peuvent entraîner du rachitisme, et ce sont les recherches menées sur cette maladie infantile, la forme pédiatrique de l'ostéomalacie, qui ont conduit à la découverte de la vitamine par Edward Mellanby en 1922.
Vitamine D et os
On sait depuis longtemps que la vitamine D est importante pour la santé des os et plusieurs travaux récents le confirment. Une étude [1] a montré qu'un déficit en vitamine D augmentait le risque de fracture de l'avant-bras chez les enfants, une autre [2] que les filles qui en consommaient le plus avaient moins de risque de fracture de fatigue. Mais les enfants ne sont pas les seuls sujets à risque : 44 % des femmes ménopausées traitées pour une fracture du radius distal ont une carence ou une insuffisance en vitamine D. Enfin, une méta-analyse [3] a montré que des fortes doses de vitamine D diminuaient le risque de fracture de 14 à 30 % dans une population de 65 ans ou plus.
Vitamine D et infections respiratoires ?
Selon une étude contrôlée randomisée[4], la supplémentation en vitamine D réduirait les infections respiratoires aiguës de l'enfant au cours du long, sombre et froid hiver de Mongolie. Selon une autre étude contrôlée randomisée[5], la vitamine D réduirait les symptômes et le recours aux antibiotiques dans un groupe d'enfants chez lesquels la fréquence des infections respiratoires est augmentée. Cependant, selon une troisième étude contrôlée randomisée[6], la vitamine D ne réduit pas l'incidence ou la sévérité des infections respiratoires chez des adultes en bonne santé.
Liens avec le diabète
Des taux bas de vitamine D seraient corrélés aux différents types de diabète. Une étude australienne[7] a montré que les enfants ayant un diabète de type 1 avaient plus souvent des faibles taux de vitamine D. On ne sait pas, cependant, si ces déficits sont la cause du diabète ou sa conséquence. Dans une étude à plus grande échelle, [8] réalisée chez du personnel militaire en activité aux États-Unis, les sujets ayant un déficit en vitamine D développaient plus souvent un diabète insulino-requérant sur 1 an. Enfin, Les femmes ayant un taux bas de vitamine D au cours du 1er trimestre de grossesse développent plus souvent un diabète gestationnel.
Vitamine D et maladie cardiovasculaire
Plusieurs études épidémiologiques, dont la plus puissante à ce jour,[9] sont en faveur du fait qu'un taux bas de vitamine D augmente le risque de maladie cardiovasculaire. Mais il peut y avoir un effet de seuil [10] avec un effet favorable sur le cœur lorsque la vitamine D passe de 20 à 60 nmol/L, suivi d'un plateau ou même peut-être d'un effet délétère pour des taux plus élevés. Malheureusement, un essai contrôlé randomisé [11] n'a pas montré que la supplémentation en vitamine D chez des femmes âgées améliorait les indicateurs de santé du coeur.
Obésité
Les enfants des femmes ayant un taux bas de vitamine D pendant leur grossesse [12] sont plus à risque d'avoir un excès de masse grasse à l'âge de 6 ans. Par ailleurs, les enfants de 6 à 18 ans [13] en surpoids ont plus souvent une baisse de vitamine D. Des taux normaux de vitamine D sont corrélés avec une moindre prise de poids chez les femmes de 65 ans ou plus. [14]
Vitamine D et cancer
Il y a moins d'informations publiées sur les liens entre vitamine D et cancer, mais il y a eu quelques avancées l'année dernière. Les chercheurs ont considéré comme « inattendu » le fait que des femmes avec un cancer du sein qui étaient traitées par de l'acide zolédronique pour des complications osseuses, avaient moins de récidive si leurs taux de vitamine D étaient normaux. [a] Une supplémentation en vitamine D peut aider les patients qui ont survécu à un cancer du sein à supporter un traitement adjuvant par inhibiteurs de l'aromatase[b]. Des différences entre les gènes liés à la vitamine D peuvent contribuer à augmenter la susceptibilité au cancer du côlon chez les noirs américains.
Fonctions cérébrales
La vitamine D a été associée à plusieurs fonctions cérébrales supérieures. Des études ont mis en évidence un lien entre l'autisme et un taux bas de vitamine D pendant la grossesse, lien qui a été renforcé par une carte montrant que l'autisme était plus fréquent chez les enfants qui vivaient dans les états où il y avait moins de rayons ultraviolets B.[15]Les patients ayant une maladie d'Alzheimer ont plutôt des faibles taux de vitamine D et ceux qui ont les meilleurs scores aux tests portant sur les fonctions cognitives ont des taux plus élevés.[16] La vitamine D3 pourrait aider à débarrasser le cerveau de la substance ?-amyloïde.[17]Enfin, des taux bas de vitamine D chez la femme enceinte ont été corrélés à un mauvais développement du langage chez leurs enfants.
Accident vasculaire cérébral et sclérose en plaques
Les données de l'Honolulu Heart Program ont montré que sur un suivi de 34 années, les personnes ayant un régime pauvre en vitamine D avaient un risque majoré d'environ 25 % de faire un accident thrombo-embolique cérébral, mais pas un accident hémorragique.[19]
En 2012, de nombreux articles ont été publiés sur le lien entre la vitamine D et la sclérose en plaques (SEP). Trois études ont été publiées dans un seul numéro du journal Neurology. [c]Une autre étude a montré une corrélation entre des taux bas de vitamine D associés à l'exposition au virus d'Epstein-Barr, et l'apparition d'une SEP.[20] Un déficit en vitamine D est un facteur prédictif de survenue d'une conversion à court terme de syndromes cliniquement isolés vers une authentique SEP. Enfin le risque d'avoir une SEP a été corrélé à une faible exposition au soleil au début de la vie.[d]
Douleur
Environ la moitié des femmes sous inhibiteurs de l'aromatase pour cancer du sein métastatique ont des douleurs musculo-squelettiques intenses,[21] qui semblent pouvoir être soulagées par une supplémentation en vitamine D2 à fortes doses. Une dose unique de 300 000 UI de vitamine D par voie orale semble soulager de la dysménorrhée.[22] Enfin, la baisse de vitamine D pourrait favoriser les douleurs arthrosiques du genou chez les Afro-Américains.[23]
Troubles pulmonaires
De fortes doses de vitamine D accélèrent la guérison de la tuberculose.[24] Des taux bas de vitamine D sont corrélés avec la nécessité de prescrire une corticothérapie dans l'asthme et une baisse de l'efficacité du traitement de l'asthme.[25]
Ce n'est pas aussi clair dans la bronchopneumopathie chronique obstructive. Selon une étude, une supplémentation par de fortes doses de vitamine D augmente la tolérance à l'exercice et renforce les muscles respiratoires au cours de la réhabilitation ; à l'inverse, une autre étude a montré l'échec de la supplémentation en vitamine D dans la prévention de la survenue des exacerbations et autres symptômes.[26]
Troubles digestifs
Les femmes ayant un taux suffisant de vitamine D ont un risque d'avoir une maladie de Crohn diminué de 62 % comparativement à celles qui sont carencées en vitamine D.[27]
Les femmes vivant au sud des États-Unis ont un risque diminué de 52 % d'avoir une maladie inflammatoire de l'intestin comparées à celles qui vivent dans le nord.[28]
Maladies rénales
La carence en vitamine D est quasi universelle dans l'insuffisance rénale chronique (IRC).[29] Selon 2 études récentes indépendantes, cette carence pouvait être prévenue et corrigée sans risque[30] chez les patients en dialyse par une supplémentation avec de fortes doses de cholécalciférol (vitamine D3). Cela pourrait également faire baisser les taux d'hepcidine chez les patients ayant une IRC.
Mais, attendez, il y a plus...
Tout au long de l'année 2012, des études ont montré que la vitamine D pouvait réduire le nombre de caries dentaires,[31] qu'une baisse de la vitamine D pourrait être due à une dépression[32], qu'un déficit en vitamine D augmentait le risque de perforation du tympan et que la baisse de la vitamine D est corrélée aux allergies alimentaires. Et la liste s'allonge...
Combien en faut-il ?
Il n'y a pas de réel consensus sur le taux sanguin de vitamine D idéal et encore moins sur la supplémentation nécessaire. L'Institut de Médecine américain donne le chiffre de 20 ng/ml mais l'Endocrine Society celui de 30 ng/ml. Les apports journaliers recommandés sont de 600 UI de 1 à 70 ans et de 800 UI pour les plus âgés. Certaines instances recommandent que les personnes carencées doivent recevoir 1000 à 2000 UI par jour, mais d'autres recommandent jusqu'à 500 000 UI en prise unique.
En France, l'Académie de médecine recommande d'augmenter les doses.
Comment la mesurer ?
S'il existe un faible consensus sur la quantité de vitamine D dont nous avons besoin, il y en a encore moins sur la façon de la mesurer dans le sang. [e]On peut choisir entre la méthode ancienne, lente mais sûre, et une des nombreuses nouvelles méthodes, rapides mais imprécises. Selon une seule étude, ces tests rapides sont inexacts dans 40 % des cas, rapportant plus souvent des patients carencés en vitamine D alors qu'ils ne le sont pas.[f]
Elixir de vie ?
Alors que la vitamine D semble être impliquée dans presque tous les systèmes de l'organisme, certains chercheurs vont même plus loin et s'orientent vers la mortalité globale. La vitamine D active orale est associée à une réduction de toutes les causes de mortalité chez les patients en dialyse péritonéale. Elle est aussi reliée à une baisse de la mortalité chez les patients atteints de pneumonie. [33] Une méta-analyse de forte puissance a montré qu'une augmentation des apports en vitamine D associée à du calcium, mais pas en vitamine D seule, est corrélée à une baisse de la mortalité de toutes causes chez les sujets âgés. [34]
En regardant un peu plus loin
Si vous avez bien observé les diapositives précédentes, vous avez vu qu'elles s'orientent vers la même conclusion : des taux faibles de vitamine D c'est mauvais, des taux plus élevés c'est bon ou c'est neutre. Affaire classée ? Peut-être pas. Une étude récente suggère que les individus ayant une prédisposition génétique à la longévité ont une fréquence moins élevée d'un variant génétique prédisposant à des taux élevés de vitamine D. Ils ont également des taux de vitamine D plus bas.[35] Si seulement la science pouvait nous donner des réponses simples et sans ambiguïté !
Liens
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Références